En écho à la nouvelle encyclique de Pape François « Tutti fratelli », sur la fraternité et l’amitié sociale, nous vous proposons de lire ci-dessous et à visionner le message que Chiara Lubich (1920-2008), fondatrice du Mouvement des Focolari, avait prononcé devant les 9.000 personnes réunies à Stuttgart, en Allemagne, lors du premier rendez-vous de « Ensemble pour l’Europe », le 8 mai 2004.  Ce fut un moment historique, au cours duquel Chiara a offert la clé pour construire la paix dans un continent mosaïque comme l’Europe, en soulignant que la fraternité universelle est un programme destiné au monde entier. 

Ce texte prophétique peut aussi nous inspirer, nous Maristes et tous ceux et celles qui veulent collaborer activement à l’avènement de la fraternité universelle.

Je remercie le Mouvement des Focolari qui nous a autorisés à publier les extraits principaux de cette intervention.

Frère Robert Thunus

Chiara Lubich :

L’idée de la fraternité universelle est et a été une profonde aspiration de la nature humaine, que nous trouvons exprimée chez de grands hommes.  Martin Luther King déclarait : « J’ai fait un rêve : un jour les hommes […] se rendront compte qu’ils ont été créés pour vivre en frères […] et la fraternité sera à l’ordre du jour d’hommes d’affaires et le mot d’ordre de gouvernants. »

Le Mahatma Gandhi affirmait à propos de lui-même : « Ma mission ne concerne pas seulement la fraternité en Inde. []  J’espère pouvoir, à travers l’établissement de la liberté en Inde, réaliser et faire grandir la fraternité entre tous les hommes. »

La fraternité universelle a été également promue par des personnes qui ne puisaient pas à des principes religieux.  Le projet même de la Révolution Française avait pour devise : « Liberté, Égalité, Fraternité. »  Mais si de nombreux pays ont réussi à réaliser, au moins en partie, la liberté et l’égalité en se dotant d’institutions démocratiques, la fraternité en est restée davantage au niveau des mots que des faits.

En revanche, celui qui a proclamé la fraternité universelle et nous a donné le moyen de la réaliser, est Jésus.  En nous révélant la paternité de Dieu, il a détruit les murs érigés entre ceux qui sont « égaux » et ceux qui sont « différents », entre amis et ennemis.  Il a libéré l’homme des multiples formes de dépendance, d’esclavage, d’injustice. Il a accompli ainsi une véritable révolution existentielle, culturelle et politique.

De nombreux courants spirituels ont, au cours des siècles, cherché à réaliser cette révolution.  Citons l’audacieux projet, le programme acharné de François d’Assise et de ses premiers compagnons pour construire la fraternité.  Sa vie a été en effet un exemple admirable de fraternité qui embrasse les hommes et les femmes mais aussi l’univers, le cosmos avec frère soleil, la lune et les étoiles.

Or l’instrument que nous a offert Jésus pour réaliser cette fraternité universelle est l’amour, un amour fort, un amour nouveau, un amour différent de celui que nous connaissons généralement.  Il a répandu sur la terre la façon d’aimer du Ciel.  Cet amour exige que nous aimions tous les êtres humains, et pas seulement nos parents et nos amis.  Il exige que nous aimions ceux que nous trouvons sympathiques et ceux qui nous sont antipathiques, nos compatriotes et les étrangers, les Européens et les immigrés, ceux de notre Église et ceux d’une autre Église, ceux qui ont la même religion et ceux qui en ont une différente. […]

Cet amour demande que nous aimions aussi nos ennemis et que nous pardonnions lorsqu’on nous a fait du mal.  L’amour dont je parle ne fait pas de distinctions et s’adresse à ceux que nous rencontrons, ceux qui nous sont proches physiquement et ceux dont nous parlons ou dont il est question ; ceux pour qui nous accomplissons notre travail quotidien, ceux dont parlent les journaux ou la télévision…  C’est ainsi en effet que Dieu Père nous aime, lui qui fait briller le soleil et tomber la pluie sur tous ses enfants, bons et méchants, justes et injustes.

Cet amour demande aussi que nous soyons les premiers à aimer.  L’amour que Jésus nous a apporté est désintéressé ; il n’attend pas que les autres se mettent à aimer, mais prend plutôt l’initiative comme l’a fait Jésus lui-même qui a donné sa vie pour nous alors que nous étions pécheurs, c’est-à-dire que nous n’aimions pas.

Cet amour demande aussi que nous soyons les premiers à aimer.  L’amour que Jésus nous a apporté est désintéressé ; il n’attend pas que les autres se mettent à aimer, mais prend plutôt l’initiative comme l’a fait Jésus lui-même qui a donné sa vie pour nous alors que nous étions pécheurs, c’est-à-dire que nous n’aimions pas.

[…] L’amour apporté par Jésus n’est pas non plus un amour platonique, sentimental, fait de mots. C’est un amour concret.  Il demande que nous nous « retroussions les manches ».  Cela n’est possible que si nous nous faisons tout à tous, malades avec ceux qui sont malades ; joyeux avec ceux qui sont dans la joie ; soucieux, dépourvus de sécurité, affamés, pauvres avec ceux qui le sont.  Et une fois que nous ressentirons en nous ce qu’ils éprouvent, il nous faudra agir en conséquence.

[…] Lorsque cet amour est vécu par plusieurs personnes il devient réciproque. C’est ce que Jésus souligne davantage : « Je vous donne un commandement nouveau : aimez-vous les uns les autres.  Comme je vous ai aimés, aimez-vous les uns les autres. »  Ce commandement, il le dit « sien » et « nouveau ».

Un tel amour réciproque n’est pas demandé seulement aux personnes individuellement, mais aussi aux groupes, aux Mouvements, aux villes, aux régions, aux États…  Notre temps exige en effet que les disciples de Jésus acquièrent une conscience « sociale » du christianisme.  Plus que jamais il est urgent et nécessaire que nous aimions le pays d’autrui comme le nôtre. […]

Cet amour, qui atteint sa perfection dans la réciprocité, exprime la puissance du christianisme parce qu’il attire sur la terre la présence même de Jésus parmi les hommes et les femmes.  N’a-t-il pas affirmé : « Là où deux ou trois sont réunis en mon nom, je suis au milieu d’eux » ?  Cette promesse n’est-elle pas une garantie de fraternité ?  Si Jésus, le frère par excellence, est avec nous, comment pourrions-nous ne pas nous sentir frères et sœurs les uns des autres ?

[…] Que l’Esprit Saint nous aide tous à former dans le monde, là où nous sommes, des espaces toujours plus vastes de fraternité universelle, en vivant l’amour que Jésus nous a apporté sur terre.

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